Alors que l’industrie s’attend à des coupes budgétaires en 2021, Mehdi Sinaceur de RATP Dev, conjure opérateurs et autorités de poursuivre les avancées vers des solutions de mobilité toujours plus écologiques.

Publié originellement sur Intelligent Transport, le 10 décembre 2020
Par Mehdi Sinaceur, Directeur Exécutif Afrique du Sud, Royaume-Uni, Amériques - RATP Dev

Après une année 2020 qui aura mis la transition écologique entre parenthèses, Covid oblige, 2021 pourrait bien marquer un tournant dans le combat contre le dérèglement climatique. La COP26, conférence des Nations unies durant laquelle les États devaient détailler les mesures qu’ils proposent pour réduire leurs émissions conformément aux engagements pris dans le cadre de l’Accord de Paris sur le climat, a été reportée à l’année prochaine. On peut s’attendre à voir la transition énergétique revenir en force à l’ordre du jour et le secteur des transports, deuxième principal émetteur au niveau mondial, ne peut se permettre de freiner sa propre transformation verte.

C’est donc en novembre 2021 que Glasgow accueillera la COP26. Le Royaume-Uni est un hôte de choix pour une conférence aussi importante puisque le gouvernement britannique a récemment présenté plusieurs plans très ambitieux pour réduire considérablement ses émissions dues aux transports. Il s’agit notamment d’interdire la vente de véhicules neufs à essence ou diesel dans les dix prochaines années et d’introduire 4 000 bus zéro-émissions. Transport for London (TfL), organisme public chargé des transports du Grand Londres, a pris les devants en annonçant lui aussi un objectif audacieux : supprimer toutes les émissions liées au transport d’ici à 2025. Tel est le type de révolutions que le secteur international des transports doit entreprendre.

Avant fin 2021, 20 pourcents de la flotte de RATP Dev à Londres sera électrique, avec 13 itinéraires desservis depuis quatre dépôts électriques. Que ce soit à Londres, où nous deviendrons l’an prochain le principal opérateur de bus électriques, ou dans les autres villes où nous sommes présents à travers le monde, nous sommes convaincus que notre capacité à mener à bien des conversions d’infrastructures majeures et des projets opérationnels complexes doit être mise au service de la stratégie de nos autorités de transport public et de leur engagement à proposer des transports à très faibles émissions.

Les efforts déployés par RATP Dev à Londres ont déjà permis de réduire de 15 % les émissions de CO2 et la consommation de carburant de notre flotte dans une ville autrefois décrite comme l’une des plus polluées au monde. Ce simple exemple montre comment des véhicules plus propres peuvent déboucher sur des solutions plus efficaces, plus saines et plus vertes, qui contribuent non seulement à lutter contre le changement climatique, mais aussi à faire de la ville un lieu de vie plus agréable. 

Si l’épidémie de COVID-19 nous invite à repenser la conception, la structuration et l’exploitation de nos réseaux de transport, elle pose aussi un risque bien réel de retour en arrière. Nous nous trouvons, sans l’ombre d’un doute, à l’aube d’une ère faite d’incertitude financière et de baisse des budgets, et le secteur des transports n’y échappera pas. Il serait pourtant dommage de mettre à l’arrêt les avancées spectaculaires déjà réalisées dans le développement de réseaux plus propres et plus verts. Notre planète ne peut pas se le permettre. Nos voyageurs ne l’accepteront pas.

Malgré la crainte compréhensible de voir les intérêts économiques à court terme entraver les progrès déjà réalisés pour aller vers des transports plus propres, l’espoir reste de mise. Aux États-Unis, l’un des pays aux transports les plus polluants, la nouvelle administration s’est montrée plus encline à collaborer avec le reste du monde dans la lutte contre le changement climatique, en réintégrant tout d’abord l’Accord de Paris. En Asie du Sud-Est, plusieurs avancées technologiques appliquées aux transports, comme les données de fréquentation en temps réel, les vélos en libre-service et les bornes de recharge rapide, montrent la voie pour des réseaux plus propres.

Autant de mesures positives qui témoignent que le secteur des transports avance dans la bonne direction. Toutefois, le risque de coupes budgétaires reste bien réel. Mais il faut avoir conscience que ces coupes ne feraient que déplacer les coûts en bout de chaîne, comme c’est le cas lorsqu’on retarde d’autres domaines d’action pour le climat. Les dépenses de santé liées à l’augmentation de la pollution et les coûts associés à la multiplication des épisodes météorologiques violents du fait du dérèglement climatique ne feraient qu’augmenter.

Les opérateurs ont donc un rôle majeur à jouer pour veiller à ce que le progrès ne s’arrête pas. Leur connaissance du terrain et leur expertise seront essentielles pour veiller à la faisabilité des plans de transports verts. Il leur appartient de faire équipe avec les autorités dans la poursuite de cet objectif commun. À Londres, RATP Dev a ainsi travaillé en étroite concertation avec TfL pour développer les infrastructures de recharge électrique du dépôt de Shepherd’s Bush et trois nouveaux dépôts seront prochainement convertis à leur tour. C’est un exemple positif de la collaboration concrète dont les opérateurs peuvent faire preuve en faveur des transports publics plus verts.

Opérateurs, autorités, décideurs ou simples voyageurs, il nous revient à tous de nous engager pour des transports plus respectueux de l’environnement. L’importance du secteur dans la lutte contre le changement climatique est connue. Mais des réseaux plus propres et plus verts apporteront aussi d’autres avantages, à la fois pour l’économie, la santé des populations et leur bien-être. Nous aurions tort de nous en priver.